L’enthousiasme de l’Allemagne à l’égard de l’exit tax se retrouve ailleurs en Europe. Le gouvernement norvégien s’en est également armé pour la nouvelle année. Dans le cadre d’un deuxième durcissement des règles en l’espace de quelques années, les riches Norvégiens paieront désormais des prélèvements sur les dividendes s’ils prévoient de s’exiler de leur patrie.
L’exit tax peut être une mesure politique utile. Après l’introduction d’un impôt sur la fortune plus élevé, un si grand nombre de riches Norvégiens se sont installés en Suisse que la DNB, la plus grande banque norvégienne, a ouvert un bureau en Suisse et que le parti socialiste a créé un « mur de la honte » pour les émigrés fiscaux. Les taxes de sortie, rapidement renforcées, sont alors apparues comme un outil défensif légitime (et un moyen de rejeter la faute sur ceux qui avaient quitté le pays). Ces dernières années, l’économie et les marchés boursiers européens ont pris beaucoup de retard par rapport à ceux d’outre-Atlantique. Cette situation incite les gens à investir ailleurs et les gouvernements à chercher de nouvelles sources de recettes fiscales.
Mais combien d’argent les exit tax rapportent-elles réellement ? Pas grand-chose. Les riches, bien conseillés, sont habiles pour trouver des échappatoires. La législation européenne complique encore les choses. Selon Christian Kempges, du cabinet de conseil Grant Thornton, les nouvelles règles allemandes pourraient enfreindre la législation européenne protégeant la libre circulation des capitaux. Selon Arun Advani, du groupe de réflexion CenTax, les options reposant sur une base juridique plus solide, telles que l’ajout d’une « queue » à l’impôt, où les personnes qui partent ne sont redevables que si elles vendent leurs actifs dans un certain nombre d’années après leur départ (huit ans, sous le mandat de Nicolas Sarkozy, portées à quinze ans sous l’ère de François Hollande, puis réduite à deux ans sous l’égide d’Emmanuel Macron) laissent des possibilités d’évasion fiscale.
Ce dysfonctionnement se lit dans les recettes perçues. Le ministère norvégien des finances estime que sa taxe de sortie modifiée rapportera 120 millions de dollars par an une fois que sa durée de validité de douze ans aura expiré, un montant équivalent à 0,04 % des recettes totales de l’État en 2023. Ce pourquoi d’autres pays renoncent à ces taxes. En France, elle ne rapporterait, dans sa version la plus dure, que 10 à 15 millions d’euros par an… sur plus de 310 milliards de recettes fiscales du budget de l’Etat.
La Finlande et la Suède ont toutes deux émis des propositions l’année où la Norvège a commencé à bricoler sa mesure, avant de les abandonner. Pour les Norvégiens qui en ont assez des hivers longs et des hauts impôts, il y a peut-être même un soulagement en vue : les partis d’opposition, sceptiques à l’égard de cette taxe, sont en tête dans les sondages.