April 18, 2025
Tax

Eric Maumy (April) mène la fronde des dirigeants actionnaires contre la réforme des management packages


Une réforme visant à revoir la fiscalité des managements packages, qui concerne principalement les dirigeants des 2 000 à 3 000 entreprises sous LBO (Leveraged Buy-Out, ou rachat par endettement) en France a été introduite dans la loi de Finances pour 2025. Ayant pour objectif de rééquilibrer la taxation des plus-values et des salaires des dirigeants, cette mesure a suscité de vives réactions parmi les concernés.

« Avec cette mesure, l’avenir de l’entreprenariat en France est menacé », a alerté Eric Maumy, président du courtier April, au moment de présenter l’association Alesi (Alliance des Entrepreneurs et Salariés Investisseurs) ce mercredi 12 mars. « Nous n’avons pas créé cette structure pour défendre les intérêts fiscaux de quelques personnes qui gagnent bien leur vie, mais pour conserver la possibilité pour les salariés d’entrer au capital de leur entreprise. » Réunissant déjà 250 membres, l’association entend défendre le régime fiscal qui prévalait jusqu’alors. Eric Maumy en est le co-fondateur, avec Benjamin Fremaux, président du groupe Idex et Ronan Lebraut, président du LBO Club.

L’article 93 de la loi de finances dans le viseur

Un régime qui prévoyait, comme pour tous les autres actionnaires, une taxation des plus-values de cession à hauteur de 30 % au titre de la « flat tax », un impôt forfaitaire appliqué aux revenus issus d’actifs mobiliers. Mais depuis une décision du 13 juillet 2021, le Conseil d’État a remis en cause la fiscalité des plus-values réalisées par les salariés actionnaires dans les entreprises sous LBO. En effet, les juges ont estimé que ces gains étaient en réalité une forme de rémunération pour un travail fourni et non des bénéfices d’investissement. Dans plusieurs affaires, ces plus-values ont ainsi été requalifiées en salaires et soumises à une fiscalité bien plus élevée.

Afin de limiter l’insécurité juridique pesant sur les management packages depuis cette décision, le législateur a créé une règle identique pour tous, en fixant dans l’article 93 de la loi de Finances 2025 un seuil en dessous duquel les gains réalisés par les salariés actionnaires demeurent considérés comme des plus-values, et au-dessus duquel ils relèvent désormais du régime fiscal des salaires (voir encadré).

Une fiscalité moins avantageuse

Si les patrons d’entreprises sous LBO, parmi lesquelles plusieurs courtiers de la place, comprennent la recherche de sécurité juridique qui a motivé cette mesure, ils alertent néanmoins sur l’impact négatif qu’elle engendre pour les managers actionnaires en terme de fiscalité. « Pour résumer, nous serons désormais taxés à hauteur de 59 %, alors que nous travaillons tous les jours pour créer de la valeur au sein de notre entreprise, et que les actionnaires simples continuent de bénéficier de l’ancien régime, à 30 % », regrette Éric Maumy. « Comment se fait-il que des actionnaires externes à l’entreprise ainsi que les fonds puissent bénéficier d’un traitement plus favorable que le manager impliqué au quotidien ? Cela n’a pas de sens. »

Le président d’April estime que « ce nouveau régime fragilise le mécanisme des management packages et prive les entreprises sous LBO d’un bon moyen d’aligner les intérêts des managers sur ceux des actionnaires, via le partage de la valeur créée ».

“Cette réforme aura un impact très négatif sur le financement de l’économie”

Il ajoute que la réforme empêche ce qu’on appelle « la relution », c’est-à-dire la possibilité pour les dirigeants d’utiliser les gains réalisés lors de la vente de leurs parts pour réinvestir dans l’entreprise lors des tours de financement suivants. Les salariés actionnaires étant désormais taxés à chaque sortie, sans possibilité de demander des reports d’imposition comme c’était le cas auparavant. « En ce sens, cette réforme aura un impact très négatif sur le financement de l’économie française et plus particulièrement sur l’ancrage des managers français au sein de nos fleurons nationaux, puisqu’il sera beaucoup plus difficile pour eux de conserver une part significative des entreprises pour lesquelles ils travaillent », souligne Benjamin Frémeaux, président du groupe Idex.

Pour infléchir les effets négatifs de la réforme, la priorité de l’association est de conserver la possibilité de faire des reports d’imposition pour réinvestir dans l’entreprise lors des différents tours de LBO. « Si on impose les dirigeants à chaque tour de financement, à chaque sortie, c’en est fini des management packages, et ce modèle de redistribution de la valeur s’écroule », alerte Eric Maumy.

A moyen terme, elle espère également obtenir un statut similaire au « carried interest » pour les fonds, dans le but de sécuriser leur statut et leurs droits, et de « favoriser la prise de risque par l’investissement de ces managers engagés dans la réussite de leur entreprise », insiste le président du LBO Club Ronan Lebraut. « Les dirigeants qui investissent dans leur entreprise prennent des risques importants, dans un actif illiquide, ils devraient bénéficier d’un régime plus favorable. »

Pas de fléchissement perceptible du côté de Bercy

Plusieurs rencontres ont déjà eu lieu à Bercy et Matignon, ainsi qu’avec la direction de la législation fiscale, présidée par Laurent Martel. Les dirigeants assurent avoir été entendus par les politiques qui les ont reçus, et « qui souhaitent eux aussi, la réussite de la France ». Ils estiment en outre être soutenus par France Invest, avec qui « il ne subsiste que l’épaisseur d’une feuille de papier » en termes de désaccord, alors que de vifs échanges avaient eu lieu avec les représentants des gérants quelques jours plus tôt, après que ces derniers se sont déclarés favorables au nouveau dispositif.

Les fondateurs d’Alesi espèrent désormais peser sur les modalités d’application de cette nouvelle mesure. « Finalement, on ne demande qu’une chose : être traités comme l’ensemble des actionnaires de l’entreprise », conclut Eric Maumy.

Seront-ils entendus ? Pour l’heure, Bercy n’a jamais communiqué sur un éventuel fléchissement de sa part, et le nouveau régime s’applique officiellement depuis le 15 février, en attendant d’éventuelles adaptations.

La nouvelle méthode de calcul

Au-delà d’un certain montant correspondant à trois fois le multiple réalisé par le fonds, le nouveau régime prévoit de taxer les gains réalisés par les salariés actionnaires dans le cadre d’une cession d’actions comme s’il s’agissait d’un salaire, auquel on ajoute 10% de cotisations sociales, ce qui aboutit à un taux applicable pouvant atteindre 59%.

En dessous de ce montant, les gains demeurent considérés comme des plus-values et le prélèvement forfaitaire obligatoire, plus connu sous le nom de « flat tax », s’applique, avec un taux de 30% au titre de la fiscalité sur les valeurs mobilières.

Pour déterminer le seuil à partir duquel on passe d’un régime à l’autre, l’avocat fiscaliste Xavier Rohmer, du cabinet August Debouzy, propose la formule suivante :

(prix d’acquisition*3*valeurs réelle de la société lors de l’acquisition/valeur réelle de la société lors de la cession) – prix d’acquisition



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